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Le Wiki des AMIELs
L'histoire nous est indispensable pour nous définir par rapport à l'histoire de l'humanité....

Nota bene : On ne saura être surpris par la focalisation, qui suit désormais, sur les régions de Languedoc et de Provence, pour ce qui concerne l'histoire de ceux qui ont porté le nom Amiel durant l'ancien régime en général et même ensuite, aux XIX et XXèmes S. car c'est bien là qu'ils ont pour la plupart vécu et qu'ils vivent toujours aujourd'hui ! Dans cette histoire patronymique chronologique, je n'ai pas, pour autant, dédaigné ceux des autres régions et ils sont cités de la même façon selon leur époque et leur notoriété.

Un peu d'histoire locale : Depuis les romains, Le LANGUEDOC D'AVANT L'AN MILLE :
*1* Introduction : La région dont on parle est ce sud de la Gaule entre Garonne et Méditerranée et plus précisément entre Toulouse et le Rhône, en gros cette Provincia Romana d'au-delà de ce fleuve (vu depuis l'Italie), moitié de la vaste province sénatoriale que Rome occupa sur le territoire des Volques après -120 av. J.C., suite à la victoire d'un certain Fabius Aemilius Allobrogicus et d'un Domitius Ahenobarbus dans la vallée de ce même fleuve (et même peut-être avant selon certains historiens actuels). La plus ancienne terre romaine de Gaule qui vit notamment naitre le 1er poète gallo-romain de la belle langue latine de ce temps, à Narbonne, Varron d'Atax, avant notre ère, resta dans le giron romain tant qu'elle le put, c'est à dire jusqu'aux invasions barbares; celles-ci finissant par avoir raison de l'Empire Romain d'Occident en 476.
*2* Les Wisigoths et la Septimanie :
°° Leur installation: Ce ne sont pas les Francs qui sont par la suite arrivés ici les premiers. Il y eut d'abord en 407 une première invasion provisoire des Vandales, des Alains et des Suèves; puis ce sont les Goths qui en 412, empruntant le même chemin que les Romains, venant des rives du Danube inférieur, et ayant déjà envahi l'Italie, parvinrent non seulement chez nous mais montèrent jusqu'à la Loire et soumirent pour un temps tous les peuples depuis la rive gauche de la Loire jusqu'aux Pyrénées et la Provence. Conduits par leur nouveau "ric" (roi) Athaulf, beau-frère d'Alaric Ier (qui a pillé Rome en 410 !), ceux que l'on appellera les Wisigoths (goths de l'ouest / goths restés au-delà du Rhône et en Italie, goths de l'est ou Ostrogoths) entrent donc en Gaule, ruinée par les invasions barbares des années 407 à 409. En 414-416 avec leur nouveau roi Wallia ils continuent leur migration dans la péninsule ibérique où ils sont envoyés à la solde de Rome pour combattre d'autres Barbares car pour les romains ils étaient bien des barbares, des étrangers !
Lorsque la paix avec les Romains est conclue par le fœdus de 416, Honorius leur accorde des terres dans la province Aquitaine Seconde (actuellement plaine de la Garonne, Bordelais, Charente et Poitou). Ces nouveaux fédérés de l'empire se sédentarisent en Aquitaine après la mort de Wallia. Mais voyons cela d'un peu plus près...
Le royaume des Wisigoths eut d’abord Toulouse comme capitale et ils occuperont finalement quasiment tout le territoire qui deviendra bien plus tard l'Occitanie. Lorsque Clovis les battit à la bataille de Vouillé en 507, ils ne conservèrent que la Septimanie (correspondant au Languedoc) et une partie de la Provence …
En somme: Bien qu'ayant pillé Rome en 410, ce qui signe déjà pour certains la fin de cet Empire, cela ne les empêcha pas ensuite de se rapprocher des Romains comme on vient de le dire et comme ils le feront plus tard avec les francs carolingiens par de ces alliances dont l'histoire ancienne comme contemporaine fournit de nombreux exemples. Leur roi Ataulph épousera même la fille de l'empereur Honorius, Placidia, le 1er janvier 413 à Narbonne, lors d'une fête fastueuse. Quelques années plus tard, vers 416 ou 418, sera élaboré un traité (le foedus noté plus haut) qui les fédèrera à l'empire. Ils s'installeront d'abord en Aquitaine puis, repoussés dans la partie ouest de la province Narbonnaise après avoir été défaits à Vouillé en 507, bataille où périra leur roi Alaric II, ils devront céder aux Francs toute la vaste Aquitaine. Leur immense territoire initial de Gaule leur avait été attribué par l'empereur Honorius on l'a dit, et ils avaient obtenu en 475 leur indépendance vis-à-vis des romains de Julius Nepos, sauf Narbonne et son port trop stratégique que Rome conservera.
Territorialement : On a vu dans la page précédente qu'ils honorèrent leur alliance avec les romains jusqu'à la dernière limite, étant à leurs côtés avec les autres peuples de Gaule pour bouter Attila et ses troupes aux Champs Catalauniques en 451, cela valait bien cette reconnaissance tardive. Ils durent donc reculer après Vouillé vers le Toulousain d'abord, puis ils se cantonnèrent en-deçà des Pyrénées entre, environ le Seuil de Naurouze et l'Ariège à l'ouest, la Montagne Noire et Cévennes au nord et le littoral à l'est jusqu'au Rhône (Narbonne puis Barcelone remplaceront successivement alors Toulouse comme leur capitale). Bien que l'on dise que Clovis lui-même serait venu mettre le siège devant Carcassonne tandis que Gondebaud, roi des Bourguignons aurait assiégé Narbonne, on sait que dès 509 les wisigoths étaient à nouveau en possession de ces deux villes.
Ils conserveront pendant plus de deux siècles ces territoires de Gaule qui sera appelée fort justement Gothie chez les Francs. Il y aura bien d'autres tentatives mérovingiennes pour les bouter au-delà des Pyrénées mais sans lendemain : En 531 par ex. Childebert, fils de Clovis pilla Narbonne et tua le roi wisigoth Amalaric. Ce nom Amalaric signifie 'roi des Amali', du nom de leur ancêtre, un nom proche du notre, tenant, lui, de la gens romaine Aemilia, peut-être peut-on y voir une émulation imitatrice (voir page onomastique) ? Cette Septimanie wisigothe que ces derniers nommèrent, eux, Galliae, couvrait donc les actuels départements de l'Aude, Hérault, Gard et Pyrénées Orientales. Si l'on excepte le dernier qui sera catalan et formera le Roussillon tardivement devenu français par le Traité des Pyrénées sous Louis XIV, les autres nommés formeront le noyau de la langue occitane d'où le nom de Languedoc qui fut donné à la région par les français plus tard. Cette région qui ne parle pas encore ce principal dialecte occitan mais le romani adapté du latin parlé en Gaule méridionale, dont dérivera par ailleurs le catalan, devint ainsi la marche septentrionale du royaume wisigoth de Tolède, l'Aquitaine formant désormais, quant à elle, un vaste royaume allant de l'Atlantique au Rhône et montant quasiment jusqu'à la Loire, soumis aux Francs. Les Wisigoths subiront entre 687 et 694 trois autres tentatives franques pour les déloger mais ils resteront là jusqu'à ce que bousculés par les Arabes dans la 1ème moitié du VIIIème S., les futurs carolingiens en profitent pour gagner leurs terres dans la 2ème moitié. Leurs cousins ostrogoths formeront à l'est un royaume commençant quant à lui à la rive gauche du Rhône, couvrant les Alpes et s'étendant sur toute l'Italie, dont se souviendront les empereurs du Saint Empire Romain Germanique en héritant en 1032 notamment avec les Alpes, de la Provence pour un temps, laquelle en conservera son autre nom d'Empéri après avoir été un siècle avant aux mains de Louis l'Aveugle, roi de Provence (890-928) et lui aussi Empereur, provisoire empereur néo-romain d'Occident quelques années (901-905).
°° L'empreinte que les wisigoths ont laissé :
= Pour ce qui concerne le nom Amelius :
On verra combien, dès le IXème S., l'imbroglio des alliances régionales aristocratiques rend ardue la distinction d'une foule de familles qui se déchirent puis s'accordent selon les circonstances pour se tailler des fiefs (la féodalité régionale et locale s'installant dans un empire carolingien défait et impuissant). Mais, en général, l'aristocratie gothique restera fidèle à la région (d'Aquitaine et de Septimanie). Pour ce qui est des noms (comme des territoires), bien que les patronymes n'existent pas encore, on sait qu'ils donnaient traditionnellement au fils aîné le nom du père quand le cadet recevait un nom en usage dans la famille ou donné par la mère, d'où l'adoption de noms "étrangers", quelquefois d'origine gallo-romaine comme Amelius, et ce nom se transmettra donc par la voie agnatique. J'explique dans la partie onomastique, page générale et page wisigoths comment leur nom insigne Amal s'est agrégé au nom latin aemilien pour donner enfin lui aussi des Amiel de cette origine.
= Pour ce qui concerne leur religion et l'attribution de titres :
Avant d'embrasser la religion chrétienne, ce peuple, déjà héritier de mythes indo-européens remontant à leur lointaine origine (Asie centrale), était passé par les Monts Zagros en Iran, on l'a dit dans l'une des premières pages de l'histoire de notre nom. En contact avec les peuples autochtones pendant très longtemps (+ de 1000 ans) les goths en ont probablement retenu quelques bribes religieuses comme par ex. le dualisme mazdéiste : cette idée du bien et du mal, auquel succèdera en Perse le manichéisme, qui ressurgira quelques siècles plus tard dans la région qui nous occupe avec le catharisme, a pu être véhiculée par eux d'abord en Bulgarie où se développera le bogomilisme et transportée ensuite jusqu'au sud de la Gaule où elle finira par éclore. Plus généralement, on peut trouver le souvenir et la trace de ces mythes archaïques, selon l'historien Joël Grisward ("Archéologie de l'épopée médiévale", Payot, Paris, 1981) dans une chanson de geste carolingienne nommée "Chanson des narbonnais"; selon lui Aimeri, le père des héros ...se conduit en possesseur du monde et cette attitude ne se comprend que si l'on admet que le comte de Narbonne soit l'héritier d'un "premier roi mythique" de type indo-européen. Grisward a mis en évidence une filiation entre les antiques récits iraniens et la geste carolingienne, qu'il voit d'origine wisigothique; et il se trouve que l'éminent Georges Dumézil pense la même chose ! Insérée après le désastre de Roncevaux, ce qui accrédite en passant le retour par les Pyrénées Orientales et non Occidentales, et par l'Aude, probabilité que j'ai évoqué, cette chanson appartient au Cycle de Guillaume d'Orange. (cf. compléments sur cette chanson page varia III).
Suivant par la suite la religion chrétienne à laquelle ils adhèrent rapidement (vers 340-370), ils suivaient en cela les empereurs romains (notamment Constance 361-377). Croyant en un seul dieu, pour eux, Jésus bien qu'être divin en était séparé, il ne pouvaient dans leur conception théologique le confondre avec le seul Dieu. Mais en 380 l'empereur Théodose Ier proclame le catholicisme, expurgé déjà des déviationnismes (par de nombreux conciles dont celui de Nicée dès 325), seule religion d'Etat. Les goths cette fois ne suivirent pas l'empereur aveuglément, ils ne rentrèrent dans le rang qu'en 589 avec la conversion de leur reik Reccared; lui aussi en fit alors la religion de son état; il entraîna la conversion de son peuple, un peuple profondément romain d'origine, non seulement en Espagne mais aussi en Septimanie. A ce sujet, certains pensent que cette distorsion de croyance qui a duré quand même deux siècles, faisant des goths des hérétiques aux yeux de Rome, est la cause de leur perte progressive de territoires en Gaule; l'église, ayant mis la main indirectement sur le pouvoir temporel par le baptême de Clovis (cf. mes articles sur Rémi), elle aurait pu engager les Francs à mater les wisigoths ariens et ceux-ci y auraient assez réussi en ne leur laissant que la Septimanie...
Ceci dit il y aura des récalcitrants parmi les nobles encore à l'orée du IXème S. sous Charlemagne ! Ces convertis originaires d'Espagne se réfugièrent au nord des Pyrénées lorsque les musulmans commencèrent à l'emporter dans la péninsule et ils furent suivis par les juifs dès la fin du VIIème S. Et avec l'installation durable des arabes jusqu'en Catalogne ce fut enfin au tour des militaires de faire de même mais les fiefs sans maître se firent alors rares dans la région; ces derniers arrivés resteront des 'milites' au service des seigneurs installés, pourvus de terres et des chevaliers en titre, devenant chevaliers pour les plus 'en cour', ou si ce n'est de simples combattants, des 'castlars', gardiens de châteaux.
= Pour ce qui concerne les terres :
Après la "Geste carolingienne" et la perte des terres chrétiennes au-delà des Pyrénées abandonnées aux sarrazins, nombre de goths vont donc réoccuper et repeupler la Septimanie (cf. aprisions). La population augmenta et à partir du VIIIème S. l'essor de l'agriculture sera remarquable des Cévennes aux Pyrénées, devançant même d'un demi-siècle l'essor des pays du nord de la Francie. Le témoignage d'un 'missi dominici' de Charlemagne, Théodulphe, est édifiant : il pourra décrire la région comme un pays riche et coloré qui s'adonnait au commerce avec les arabes d'Espagne, leurs voisins d'outre-Pyrénées, à l'antipode d'une image de 'province déserte' que présentaient beaucoup d'historiens.
= Leurs traces visibles :
*Peu de traces des wisigoths sont présentes de nos jours, n'ayant pas beaucoup été des bâtisseurs dans la région du moins; de plus la croisade albigeoise a fini de détruire le peu qu'ils purent laisser. Dans l'Aude on peut déceler une ligne de fortifications sur le versant sud de la Montagne Noire depuis Montferrand (jusqu'à Bize) passant par Pezens, le site de l'église St Julien et Ste Basilisse au carrefour de plusieurs villages (Salsigne, Lastours et Villanière), Cabaret à Lastours ou Citou; on peut citer le site important de Peyre-Clouque près du seuil de Naurouze, cimetière paléo-chrétien inclus dans une basilique datant du Vème S., elle-même inscrite dans une plus vaste propriété gallo-romaine, celle qui accompagnait la station de la Via Aquitania, dont parle déjà Ciceron dans son Pro Fonteius (~-70); aussi la tour wisigothe d'Escales ou celle de Fa dans la vallée de l'Aude, le village de Croux, de nos jours simple hameau d'Antugnac proche de Fa, le très important cimetière situé près de Molandier dans la vallée semi-audoise, semi-ariégeoise de l'Hers ou celui du Mourral des Morts à Villarzel-Cabardés près de Carcassonne, des églises dans les Corbières dans la contrée de Durban par ex. ou St Martin-des-Puits (seul arc outrepassé wisigoth de France), dans le Carcassonnais à Villarzel-Cabardés encore avec N-D de la Lauze (opus spicatum de l'architecture), des titulatures de saints d'origine espagnole comme Eulalie, Félix, Estève, Julien et Basilisse, Ruphine, Cristol, Just et Pasteur ou Léocadie, disséminés dans les églises de tous les pays audois.
* Parmi les débris architecturaux plusieurs piles d'autels gravées d'entrelacs typiquement wisigothiques ont été conservés à St Polycarpe, Rennes-le-Château, des sarcophages entreposés au musée lapidaire du château comtal de la Cité de Carcassonne (outre ceux de Naurouze visibles sur place). On a souvent d'autre part tendance à confondre les maigres traces de leurs bâtis avec la période gallo-romaine, comme c'est le cas pour les tours les plus anciennes de la Cité (enceinte intérieure nord) que l'on considère de nos jours non plus comme étant wisigothes mais bien gallo-romaines.
* Ils restent présents par l'onomastique, depuis le village de Roumens en Lauragais qui fait référence à eux par le suffixe typique en -ens mais aussi au peuple qui leur permit de s'installer dans la région, les Romains; le suffixe -ens étant très présent même, on peut citer d'autres villages comme Pezens, Arzens, Douzens, Argens (-Minervois), Peyrens, Moussoulens, Sauzens, Badens, Couffoulens, Maquens, Roullens, Seignalens, Escueillens, tous dans l'Aude ! Et il se peut fort aussi Marquein (cf. page toponymie le suffixe -ain ou ein qui peut également les rappeler dont autour des Pyrénées Amalain et Amelein). Certains pensent que les toponymes en -aze sont aussi un souvenir d'eux; les Ases étaient dans leur mythologie des dieux; il faut dire que plusieurs communes en -aze sont à remarquer dans la vallée de l'Aude : Espéraza, Couiza et Montazels (limitrophes !), à quelques km Veraza, ou encore les Sauzils ou un certain Coustaussa (proche des trois premiers !).... voire un peu plus loin, Salza dans les Corbières à l'est ou Marsa sur le plateau de Sault au sud, des noms de séjour qui se sont éventuellement mélangé (plusieurs autres toponymes existent en az comme les communes de Donazac ou Villebazy, Malras...) avec des appellations plus anciennes, remontant peut-être aux Redones, ces celtes qui établirent leur chef-lieu à Rennes-le-Château. Pour ce qui est des noms d'hommes, outre les Amelius de cette origine et les Amalric déjà vus, un nom est à remarquer, celui de Guillaume qui sera très porté durant le moyen-âge en Occitanie, un nom individuel qui, lui aussi, est devenu un patronyme courant dans la région sous la forme de Guilhem, traduction locale de Willelmus, typiquement d'origine germaine, pour ce temps-là, gothe....
*3* Vis-a-vis des juifs :
L'unification religieuse du royaume de Tolède, le peuple devenant chrétien, s'accompagne après 615 d'une renaissance culturelle avec notamment Isidore de Séville (qui écrivit leur histoire, Histoire des rois Goths, vers 620) mais aussi d'une législation anti-juive. Les hérétiques de la foi officielle, les païens et les juifs sont en effet 'invités' à se convertir. En 615 c'est même une conversion forcée; mesure pourtant inapplicable elle est cependant renouvelée jusqu'à la fin du siècle. Les débats à ce sujet définissent un statut de juif indépendant de son adhésion au judaïsme car il s'applique aussi aux convertis au christianisme, ce qui pose des problèmes religieux et juridiques insolubles. Dans les années 580-635 d'autres mesures semblables seront prises autant chez les mérovingiens que dans l'empire romain d'Orient. Ce durcissement envers la religion juive se renouvellera régulièrement en Occident, on le sait; il montre en tous cas pour cette période une évolution générale tendant vers le nouveau modèle de société que sera la chrétienté.
*4* Les Arabes et la conquête carolingienne :
Lorsque les carolingiens remplacèrent les mérovingiens, ils ne cherchèrent pas à annexer immédiatement la Septimanie, laquelle se défendait très bien seule pour contenir les Arabes, du moins au début mais on verra plus loin qu'ils finirent par intervenir après Poitiers, se sentant munis de l'appui du ciel.
Une courte conquête musulmane envahit donc provisoirement la région, les arabes ayant absorbé le royaume wisigoth en Espagne en 711. Ils passent les Pyrénées entre 715 et 719; en 720 Zama s'empare de Narbonne. Une mosquée a peut-être alors existé sous St Rustique de Narbonne (?) et l'un de ses gouverneurs provincial Munuza aurait épousé une wisigothe, Lampégie, fille du comte de Toulouse croit-on. En 721 eut surtout lieu la bataille de Toulouse au terme de laquelle le duc d'Aquitaine, Eudes, arrête net la progression des arabes dans sa région. Ce fait d'armes est plus important que ce qui a pu se passer à Poitiers en 732, date qui est pourtant plus connue car insérée, magnifiée bien faussement dans le récit national français. 721 est une date déterminante pour la suite des évènements liés à cette invasion, notamment parce qu'elle offre un temps suffisant à Charles Martel pour s'imposer et constituer une armée capable de repousser ces tentatives au-delà des Pyrénées. Car il s'agit plutôt seulement d'un semblant d'installation durable mais qui motiva quand même les derniers rois Francs à se protéger et à entrer en action via leurs maires du palais afin de (re)conquérir à leur tour le pays : Les arabes sont donc repoussés en 732 près de Poitiers, puis chassés des rivages de Méditerranée pour un temps par Charles Martel, mais ils dévastent à nouveau la Provence en 756 alors que le même Charles accourt dès 755 par la vallée du Rhône et reprend Avignon puis Narbonne qu'ils avaient réoccupé entre temps; enfin Narbonne sera définitivement libérée en 759. C'est surtout la Bataille de la Berre, du nom de la rivière qui coule près de Portel (des Corbières), qui restera mémorable pour ce temps-là : là ou à proximité un contingent supplétif arabe avait débarqué (vers Sigean), Pépin le Bref emportera en ce lieu une victoire remarquable sur les infidèles. Il y eut par la suite et selon leur habitude d'autres incursions sans lendemain dont celle qui donna lieu à la Bataille de l'Orbieu ou Orbiel en 793 que l'on situe suivant les interprétations du nom latin du cours d'eau désigné dans les chroniques Oliveio soit à Villedaigne ( où coule l'Orbieu, à l'O de Narbonne) soit au sud de Conques (sur l'Orbiel, au N proche de Carcassonne); bien que perdue par les chrétiens, ils regagnèrent l'outre-Pyrénées en emportant un fort butin; on voit déjà ce qui était important pour eux ! Ce fut d'ailleurs (enfin) une époque où les chevauchées musulmanes fulgurantes autant vers le Proche-Orient et l'Inde qu'en Afrique du nord ou en Espagne connurent un net ralentissement et même des revers (en Afrique du nord notamment avec les Berbères !). Il n'y eut ensuite qu'une ultime et brève incursion sarrazine en 795 au cours de laquelle ils ravagèrent une dernière fois Narbonne, battirent près de Lagrasse une dernière fois Guillaume au Court-Nez, duc d'Aquitaine, et repassèrent définitivement en Espagne, avec une dernière fois un riche butin et de nombreux prisonniers-otages. Et le 1er roi de la nouvelle race, Charlemagne, petit-fils de Charles Martel ne s'arrêta pas en si bon chemin; repousser les Arabes au-delà des Pyrénées ne suffisait pas; il pénétrera en Hispanie et cherchera à éliminer ou au moins à chasser les infidèles musulmans de son voisinage pyrénéen surtout aux deux extrémités de la chaîne. Ce fut comme on le sait un échec, du moins du côté ouest des Pyrénées, à Roncevaux, c'est du moins ce que raconte sa légende et tant de lieux de cette contrée. Du côté est ce n'est pas la même déconvenue : après avoir reconquis une bonne partie de la Catalogne, il est repassé en Francie soit par l'Ariège - une légende forte existe à Sabart et des chercheurs ariégeois actuels en sont convaincus - soit par la vallée de l'Aude et le col audois de St Louis,. L'Aude où il a laissé tant de témoignages, mythiques souvent, relatifs à son nom ou à son fidèle Roland, dont d'ailleurs la fiancée se nommait curieusement... Aude, où l'on est ici tout autant persuadés qu'il est passé. Un roman rare (5 versions connues seulement) expose dans l'exemplaire de Carcassonne comment le grand Charles vint à Lagrasse et y fonda l'abbaye; traduit en langue romane au XIIIème S. par le moine Vidal de Lagrasse, mais écrit en latin sur 32 feuillets sur parchemin, le précieux récit raconte cet acte en le rapportant aux faits d'armes de Charles le Grand et à ceux de son fidèle Roland dans ces guerres, d'où son titre "Gesta Caroli Magni ad Carcassonam et Narbonam et de aedificatione monasterii Crassensis, autore Philomena", œuvre signée donc de Philomena par lequel ce roman est connu, son scribe juré et historiographe. Et de nos jours jusqu'au très français et savant historien Jean Favier qui évoque dans ses écrits sur Roland et Roncevaux la possibilité d'un retour de l'armée carolingienne via "Carcassonne et Narbonne plutôt que vers l'Aquitaine" par le Col de Panissars probablement pour lui. Charlemagne laissera une grande partie de l'Espagne aux "gens de la tente" c'est ce que signifie l'appellation de "Sarrazins" par laquelle on appellera pour des siècles ces infidèles, mais en établissant une large frontière pour se séparer d'eux; ils resteront en terre ibérique près de huit siècles comme on le sait. Cette large zone d'isolation constituée de la région allant des Pyrénées à l'Ebre, catalane, avec l'Aragon, la Navarre et l'immense Gothie (formée du Languedoc et de la Catalogne) constituera ce que l'on nomme des "marches", large bande de territoires tampon entre l'Europe chrétienne et le reste (large moitié sud de la péninsule ibérique) abandonnée aux sarrazins. Toute ce vaste territoire deviendra un pays au contact de cette Espagne musulmane, source de pillages et de razzias bien entendu, mais aussi par d'inévitables contacts et échanges civilisés, source de culture et de richesse aussi (par ex. métrique de la poésie, intonations chantées, instruments de musique, formes architecturales, sciences).
*5* Des wisigoths à la féodalité carolingienne :
Les wisigoths seront finalement de très bons administrateurs locaux, ils seront des appuis armés efficaces dans la lutte contre les musulmans et les carolingiens maintiendront en conséquence leurs coutumes et droits.
L'unité régionale sous les Carolingiens fut toutefois très relative; le pays frontière fut divisé en comtés et vicomtés, à la tête desquels des dynasties soit wisigothiques soit descendant des gallo-romains soit alliées entre elles soit enfin franques vécurent une existence troublée. Et sans compter de plus sur les nombreux évêchés de la vaste province ecclésiastique de Narbonne, antique toute première primatiale des Gaules, qui participaient aussi à ce jeu dynastique de pouvoir régional.
L'étude de l'aristocratie carolingienne languedocienne dans les comtés de Béziers et d'Agde montre par ex. qu'entre les années 870 et 950 les goths paraissent particulièrement présents dans quatre zones et l'anthroponyme Amiel particulièrement à Sérignan dans le suburbium de Béziers ainsi qu'à Aumes près d'Agde. (cf. Genèse des lignages méridionaux de Cl. Duhamel-Amado, Cnrs Univ. Toulouse Le Mirail, 2001).
*6* L'ère carolingienne et le renouveau de l'Eglise : Le Languedoc demeure un pays fortement marqué par les structures romaines : malgré les difficultés les villes ne cessent de constituer l'armature des pouvoirs. Les wisigoths ont sans aucun doute calqué leur organisation sur le modèle antique même s'il nous est difficile de juger pertinemment d'une permanence d'une prospérité à la romaine en ces temps plus troublés. Il est certain que les échanges avec les pays riverains de la méditerranée auxquels correspond le dynamisme des communautés juives (à Narbonne, Montpellier, Uzès ou Barcelone aussi) se maintiennent, de même que quelques foyers musulmans. Les zones littorales conservent à n'en pas douter une mise en valeur assez dense, mais dans l'arrière-pays les terres vacantes semblent nombreuses. On a vu que Charlemagne incitera les réfugiés chrétiens wisigoths d'Espagne, refoulés par les Arabes en France, à s'installer dans cet arrière-pays par des attributions de terres (c'est le phénomène de l'aprision, terres sans maîtres prises par le domaine du fisc royal pour réattribution) comme ce fut le cas de Jean, 1er comte de Fontjoncouse. De grands domaines seront ainsi affectés aux nouveaux comtes pour sceller leur fidélité; l'église pour sa part se réinstallera et sera incitée à fonder de nombreuses abbayes, monastères, et des prieurés en dépendant, hors des routes les plus fréquentées comme Caunes, Alet, St Hilaire ou Lagrasse; les terres seront défrichées drainées ou arrosées par des canaux et mises en cultures. Le nom de Paziols par exemple dans les Corbières, est significatif : de nos jours plaine viticole en déshérence c'était en ces temps-là un vaste marais, des paluds dont Paziols tire son nom (pasulis), qui furent asséchés par le travail des moines de Fontfroide; on devine encore les canaux qui furent creusés pour l'assèchement dont le ruisseau de l'Aïgua Maïrala (canal principal) garde le nom. Ainsi la foi chrétienne sera à nouveau réimplantée durablement, Charlemagne lui-même aurait fondé plusieurs de ces établissements comme Lagrasse, on l'a vu ou Caunes dans les pays d'Aude. Des installations qui étaient sans doute nécessaires dans un paysage religieusement alors assez terne depuis les temps héroïques, sans remonter pourtant à Paul Serge (Ier S.), non, en pensant seulement aux temps des saints christianisateurs du IIIème S. (Sernin de Toulouse, Papoul du Lauragais, Hilaire de Cracassonne...) ou de St Martin et Sulpice Sévère (début du Vème) plus proches. Ces monastères profiteront aussi grandement de l'aprision et surtout du don de terres par ceux qui gagnaient ainsi quelques indulgences pour l'au-delà, puissants comme modestes tenanciers. On peut citer ici les grands noms de Benoît d'Aniane, fils du comte wisigoth de Melgueil (Abbaye d'Aniane), pilier de la renaissance carolingienne et rénovateur bénédictin, ou Guilhem de Gellone, cousin de Charlemagne par sa mère (Abbaye de St Guilhem-le-Désert), comte de Toulouse quelquefois dénommé Guillaume d'Orange; leurs fondations monastiques, bien qu'elles ne brillèrent pourtant pas par leur érudition, constituèrent quand même, dans l'intervalle des villes, l'assise de la domination carolingienne (dont la famille de ces Guilhem franks, comtes d'Aquitaine, que l'on a appelé la dynastie des Guilhemides) tout en mettant en valeur de grandes surfaces cultivables et irrigables. La plupart des Amiel trouvés à cette période sont d'ailleurs des ecclésiastiques, évêques d'importants sièges, mais aussi des donateurs de quelque terre, vigne, pacage.
*6* Les libertés locales : Toutefois la puissance carolingienne va s'étioler dès la fin du IXème S. cédant la place aux seuls pouvoirs comtaux et vicomtaux désormais maitres des lieux et à la dynastie capétienne à la fin du Xème S; et aux Guilhemides succèderont les Raymondins de Toulouse; il est vrai qu'il n'y aura aucune mainmise du pouvoir central royal : pas d'uniformisation législative ou administrative, les droits anciens romains comme wisigoths ou francs s'appliquant selon l'appartenance de chacun; on peut citer l'ex. d'un 'vicarius' (officier de justice) Amiel appelé à trancher un litige, près de Conques (12) en janvier 934 lors d'un "plaid" de justice, probablement assisté de 'judices' (juges), de nombreux "boni homines" représentant la communauté, ce qui indique bien que la féodalité mit du temps pour s'imposer durant tout le Xème S.. De même les particularismes religieux seront tolérés et les notables confirmés (dont ces vicaires dont la fonction deviendra héréditaire).
C'est à cette époque qu'apparaissent dans les actes les Amiel seigneurs locaux autant dans tout le demi piémont est-pyrénéen et le toulousain que dans les pays d'Aude en remontant la zone littorale jusqu'au Rhône et au-delà en Provence comme on le verra dans une autre page qui suit. C'est un autre chapitre de cette histoire régionale qui s'ouvre alors; une histoire dans laquelle par cette relative autonomie religieuse, administrative, judiciaire d'un vaste comté de Toulouse, ou en Provence, va s'épanouir la langue et la civilisation occitane dans une féodalité toute régionale empreinte d'une rare liberté. Mais finalement de quoi il en retourne ?, si je puis dire, de cette période wisigothique dans la région....
La SEPTIMANIE, de la ROMANITE à la FEODALITE et d'histoires en histoire ! :
Le roman national français nous dit que Charles Martel a repoussé les Arabes dans le sud de la France lors de la bataille de Poitiers en 732, au pays des Wisigoths, celui de la Septimanie, bien qu'il s'agisse tout au plus d'une de ces razzias dont les sarrazins étaient coutumiers mais la gloire de l'histoire de France est sans doute à ce prix !! Ce qui est certain c'est que, durant tout le VIIIème S. les contrées méridionales se dépeuplèrent de leurs habitants, car la période d'occupation arabe, bien que courte, fut assez difficile voire terrible. De ce temps de quelques dizaines d'années, l'histoire populaire a retenu surtout la légende de Dame Carcas à Carcassonne dans laquelle cette Dame aurait été une veuve musulmane de haut rang qui aurait défendu les murs de la citadelle occupée devant Charlemagne avec succès au moins pour un temps - Dame Carcas aurait fait jeter par-dessus les murailles de la cité un cochon gavé de grains pour indiquer que les assiégés avaient de quoi se nourrir et que donc il était vain de les attaquer; et Charlemagne aurait levé le camp ! , expliquant du même coup l'origine du nom de la ville, Carcas ayant fait sonner la trompe pour avertir le grand Charles de son action (Carcas sonne) - par contre la Bataille de la Berre dont j'ai parlé précédemment est de nos jours totalement oubliée, pourtant elle est, elle, historique -; il n'aura suffi finalement que de quelques décennies pour que Charlemagne et ses père et grand-père avant lui aient définitivement raison des Maures et les repoussent au-delà des Pyrénées, avec l'aide des wisigoths toutefois. La Septimanie devient alors catholique et franque, sa nouvelle appellation sera Romania pendant un temps mais c'est Gothie, qualificatif plus parlant peut-être pour les carolingiens, qui prévaudra dans les actes.
De l'autre côté des Pyrénées c'est un peu l'inverse qui se passe : les fugitifs d'hier devenus chrétiens non déviants, ne veulent pas se trouver sous la coupe des Arabes, ils vont se réfugier dans la Marche d'Espagne puis, pour une grande partie d'entre eux repasser ces montagnes durant tout le IXème S. et repeupler les terres qu'ils avaient dû abandonner quelques dizaines d'années auparavant comme cela a été dit (cf. l'aprision). Beaucoup d'entre ces "nouveaux anciens colons" firent reconnaitre leurs droits par l'Empereur et purent rester à demeure. Certains (re)devinrent ainsi des 'potens' (puissants), d'autres des 'majores' (importants) et même des 'nobiliores' (nobles) pour les plus doués, tous en tous cas des protégés de Charlemagne et pour les derniers de simples chevaliers; ils avaient ainsi outre un statut social et des titres de propriété pour les mieux dotés, tous une protection contre le retour éventuel de ces infidèles par référence à la promesse que l'Empereur avait fait de les défendre en défendant leur territoire, son territoire et la foi chrétienne.
(=> en partie d'après "Etude historique sur l'établissement des espagnols dans la Septimanie aux VIII & IXèmes S...." E. Cauvet Montpellier, Imp. Centrale du Midi 1898).
A n'en pas douter beaucoup se sont réinstallés sur les terres que leurs familles avaient dû fuir et parmi eux il y avait très certainement outre ces wisigoths, des descendants lointains des derniers gallo-romains, des juifs et donc des Amelius, des Amali et des Amiel. Si, pour la plupart, les dangers seront plus ou moins terminés avec l'émergence et l'installation durable de la féodalité, dans un cadre civil administratif, militaire et religieux régional pour le moins chrétien, les juifs, tenant ferme de leur religion que l'on considèrera longtemps comme déicide, devront pendant de nombreux siècles encore se soumettre de gré ou de force au pouvoir dominant catholique, féodal et ecclésial...
Il est temps de voir les personnages du nom encore aemilien ou déjà amelien de ce temps...
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