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Le nom Amiel dans les lettres 3

20 février 2012 · No Comments

L’Antiquité est bien oubliée, les hordes barbares du nord et du centre de l’Europe ont tant labouré la vieille terre romaine de l’immense empire latin qu’une nouvelle civilisation va émerger, faite du terreau de cette remarquable culture sur lequel va s’épanouir lentement la féodalité et le Moyen-Âge. Contrairement à l’idée généralement répandue ces sept siècles qu’englobe cette période n’ont pas été un obscur repliement, un âge sombre, triste, de stagnation ou même de recul pour les peuples du vieux continent. Le génie propre à ces héritiers des celtes, des gaulois, des grecs, des romains ont su s’agréger aux nouveaux venus qu’ils soient francs, goths ou même vikings ou arabes. On retrouvera dans tel ou tel domaine les apports des uns et des autres se mêlant au vieux substrat antique. Le cas de la nomination des individus est un exemple frappant à ce sujet. Je l’ai déjà évoqué mais il est important de savoir comment nos noms (et prénoms quelques temps après) se sont formés; sans voir cela en détail je rappelle que notre nom Amiel fut d’abord au moyen-âge un simple prénom (ce quelque soit son origine) diversement écrit (selon les langues parlées plus ou moins romanisées donc suivant les implantations géographiques des locuteurs et des scribes) et qu’il devint un nom patronymique progressivement, au plus tôt à partir de la fin du Xème S. (là aussi même remarque). On ne sera pas étonné de le retrouver dans plusieurs oeuvres littéraires de ce temps dont la forme est propre à cette période, période donc originale et nouvelle pour la création culturelle. C’est à travers les fabliaux, histoires, ballades, chansons de geste, chroniques, mystères ou passions (ces derniers étant spécifiquement à thèmes religieux) que se sont exprimés les auteurs du moyen-âge. Souvent à but d’éducation ou d’édification ces oeuvres généralement présentées à tous devant les parvis des églises ont eu des succès importants, certaines étant connues en quelques années dans une bonne partie de l’Europe et donc traduites. Voici quelques exemples qui font voir notre nom (j’ai utilisé la graphie la plus souvent rencontrée pour chaque oeuvre).

Le nom d’Aemilianus abrévié en Melianus fut un personnage de fabliaux : il est un des chevaliers du Roi Arthur (vous savez ces chevaliers de la Table Ronde) qui, avec Bérius, autre chevalier, va chasser une bête sauvage non dans le Gévaudan (ça c’est au XVIIIème!) mais dans les Alpes, plus précisément au Mont du Chat (d’où le nom du lieu). Ce Mélianus aurait, après la mise en pièces (c’est le cas de le dire!) de la bête, fondé la ville de Montmélian (!) tandis que son compagnon aurait, lui, fondé la ville de Chambéry (!!) localités distantes d’une quinzaine de kilomètres ou comment l’histoire peut s’accommoder de légendes, belles quant à faire. (cf. « Les environs de Chambéry: guide historique et archéologique » G. Pérouse La Fontaine de Siloé. Les Marches. Montmélian 1993). Un autre chevalier, cette fois-ci du nom d’Alexandre Amiel est cité avec d’autres dans les Chroniques de Jean Froissart, ce peintre du monde féodal de la deuxième moitié du XVème S., chroniques dont le titre à rallonge précise que l’auteur y traite des « Merveilleuses emprises, nobles aventures et faits d’armes advenus en son temps en France, Angleterre, Bretaigne, Bourgogne, Ecosse, Espagne, Portugal et ès autres parties… ». Encore au XVème S. mais sans doute au tout début, un certain Nicolas de Padoue a composé ou plutôt compilé à partir de poèmes français une chanson de geste qui eut un succès considérable en Italie: « L’entrée en Espagne » qui a pour cadre l’époque de Charlemagne et son épopée en Espagne avec son fidèle Roland (oui, celui de Roncevaux). C’est l’oeuvre d’un contemporain de Dante dans laquelle se mêle au style militaire une érudition curieuse, une certaine connaissance de l’antiquité (rare encore alors mais bien annonciatrice de la Renaissance) qui éclate presque à toutes les pages: On y voit les noms de Fabius, Titus, Tarquin, Vénus et dans le vers 1417 un Amilius (« Che ne fu Amilius pour le primier roman » parlant sans doute de cet Amilius roi d’Albe lié dans la légende de Rome au premier des Romains, Romulus, revoyez ce que j’en dis) (cf. « Les épopées françaises » L. Gautier Vol 2 Paris Palmé 1867).

Depuis sa reconnaissance par l’empereur Constantin Ier au début du IVème S. l’Eglise a su utiliser tous les nouveaux moyens pour propager la foi et asseoir ainsi son emprise sur la société. Ce fut vrai du temps qui suivit la chute de l’Empire (476) temps des envahisseurs  auprès des Mérovingiens puis des Carolingiens et des Capétiens. On ne peut s’étonner de voir représenter des scènes bibliques devant ou dans les églises : tout comme l’architecture des lieux de culte, le déroulement des offices, la ponctuation systématique de la vie quotidienne par quelque commémoration religieuse, les prescriptions diverses concernant les moeurs ou les nourritures… toute la vie était religieuse. Ainsi dans ce cadre sont représentés les mystères et autre passions. Deux exemples de ces spectacles destinés, comme les sculptures, scènes bibliques ou statues, à situer toute vie humaine dans ce cadre incontournable. Le « Mystère de la Passion » drame religieux datant d’avant 1452 (déjà célèbre alors car représenté à Abbeville et venant de Paris), narrant la Passion du Christ (les derniers jours avant sa condamnation, sa mise en croix, sa mort prélude à sa résurrection) dans lequel on voit des romains côtoyer sans difficulté un chevalier du moyen-âge (la vie présente entre ainsi dans cette lointaine antiquité et les distances sont effacées, la Passion c’est aujourd’hui et ici). Ecrite par Arnoul Greban, un « faiseur de mystères » qui travaillait sur commande de l’Eglise, ce genre de représentation biblique eut lieu entre 1450 et 1550 et celui dont on parle fut le premier des plus grands: il durait quatre jours, faisait intervenir deux-cent-vingt personnages et on sait qu’il fut joué dans tout le nord, l’ouest et le centre de la France! On y trouve un personnage du nom d’Aemilius, vendeur d’oiseaux. Curieusement d’autres « Passions » font référence aussi à des ‘pigeons’ et à des Aemilius, sans être identiques pour autant. Une Passion dite d’Arras, antérieure a pu servir de modèle à moins que les deux se soient inspirées de sources identiques. La Passion dite de Valenciennes introduit, elle, dans une scène, un vol de pigeons par Barrabas (l’un des deux voleurs crucifiés avec Jésus) et, alors qu’il s’apprête à les manger en bonne compagnie, voilà qu’arrive le guet (assurant le calme et la tranquillité des habitants). C’est un chevalier de Pilate le procurateur romain qui a pour nom … Emilion; il emmène les bandits lesquels figureront dans les scènes du jugement et de la passion sur la croix. Cette scène n’est pas dans la Passion de Greban; par contre outre le vendeur d’oiseaux Emilion (Aemilius), qui est un des ‘marchands du Temple’ chassé par Jésus, un autre Emilion est aussi présent et bien chevalier de Pilate. (cf. « Le mystère de la Passion en France du XIV au XVIème S. E. Roy Dijon Damidot 1903).

L’édification passe aussi par l’exemplarité des martyrs et saints que l’église montre et met en avant depuis très longtemps; outre les reliques véritables preuves de la vérité évangélique (talismans utilisés comme guérisseurs divers et improbables, objets de grande vénération, de pèlerinages et d’ostentations réguliers) on met en images si je puis dire les faits et gestes qu’on leur prête, lesquels sont évidemment empreints de miraculeux et d’extra-ordinaire lesquels ne pouvant être que d’origine divine et spéciale. Il en va ainsi pour l’histoire merveilleuse d’Amis et Amile (leur nom fut adapté aux langues de l’Europe entière dans lesquelles cette histoire fut traduite: allemand, anglais, breton, italien et même islandais!). L’histoire-type, le fond paraît provenir d’Orient par les Byzantins, puis via le latin en France.. La pièce française est du XIVème S. tirée donc de l’histoire d’Amicus et Aemilius, un poème antérieur et mise en vers latins vers le XIIIème S. Elle a fourni le sujet à un drame italien du XVème S., d’une tapisserie historiée du roi Charles V (1364-1380) ainsi qu’un tableau d’Assise en Italie. Reprise en français elle fut rimée en vers au XIVème S. sous le titre de « Dit des Trois Pommes », mise en prose au XVème et enfin, après avoir été imitée en Espagne, descendit dans la rue sous la forme d’une Ballade. Le peuple put alors se l’approprier après avoir charmé la noblesse autant que le clergé. On trouve les appellations diverses de Amico et Amelio (Italie), Amys et Amille (nord de la France), Amys et Amylon (Amilion, Amille) en Angleterre voire Amiloun (Milou étant de nos jours non seulement le nom d’un chien de BD mais aussi un patronyme dérivé, diminutif affectueux d’un Milien, lui même parent par aphérèse d’un ancien Amilien). Cette fameuse histoire si diffusée alors (Gutenberg n’a pas pourtant pas encore inventé l’imprimerie!) raconte l’amitié indéfectible de deux amis, Ami et Amiel que je vous conterai, et qui sont vénérés comme saints à Mortara (Italie) sous les noms d’Amicus (St Amique) et Amelius (St Amèle) tous les 12 Octobre.

Mais me direz-vous vu l’horrible période cathare qui a bouleversé le sud de la France dans ce même moyen-âge, il serait bien extraordinaire que des auteurs ne se soient pas emparés du sujet pour développer par des romans historiques voire philosophiques ce thème, et il n’en parle pas? Rassurez-vous c’est pour la prochaine fois!

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