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Relations entre histoire et mémoires :
S'il faut distinguer ces deux termes, il y a aussi lieu de voir cependant leurs interactions. Le professeur d'histoire Pierre Laborie à écrit dans ce cadre ceci : "Face à la complexité de tels mécanismes, le rôle de l'historien n'est pas seulement de distinguer la mémoire de l'histoire..... mais de faire de cette mémoire un objet d'histoire... et sur le sens que les acteurs veulent ainsi donner au passé. C'est dans cette confrontation au phénomène de la mémoire et à ses représentations que l'historien prend la mesure des poussées contradictoires qui s'exercent sur lui. ... Il s'agit de pouvoir témoigner de ce qui a été, de la façon dont cela a été. Conservateur de mémoire, l'historien se trouve chargé de préserver ce qu'il doit par ailleurs décaper et démythifier. Il est et doit être, tout à la fois, un sauve-mémoire et un trouble-mémoire, attentif à rappeler que des lignes de fracture existent et que tous les écarts ne sont pas réductibles."
(=> article publié par le professeur Laborie, enseignant à la Faculté du Mirail à Toulouse et directeur d'études à l'EHESS Paris, dans la revue Esprit en 1994).
Nous voilà donc prévenus et, sans pourtant pouvoir nous résoudre à supporter l'incroyable vague actuelle de déconstruction du catharisme, j'oppose à ces tentatives académiques des historiens du nord de la France, ce qui suit, cette post-mémoire pluri-séculaire qui en dit long sur ce qu'ont durement vécu les populations d'entre Garonne et Méditerranée au XIIIème S.
POST-MEMOIRE PLURI-SECULAIRE du CATHARISME ? :
On appelle "post-mémoire" cette mémoire souterraine et énigmatique, à la fois intime et collective, qui caractérise la transmission d'un traumatisme historique à des générations qui ne l'ont pas vécu. L'exemple le plus récent peut être trouvé dans les générations juives qui n'ont pas vécu l'holocauste de leurs ainés mais cette mémoire peut traverser des générations et probablement des siècles.
Serions-nous d'une part hantés par la mémoire de nos ancêtres et d'autre part gardiens de leur passé ? Quelle voie secrète emprunte ce traumatisme pour se perpétuer et maintenir ses effets chez les descendants des personnes qui l'ont subi ? Comment arrive t-il à se frayer un chemin sur des générations et ressurgir souvent sous forme de troubles psychologiques plus ou moins accentués (anxiété, cauchemars, reviviscences, reminiscences ...) ou bien plus souvent sublimé dans des expressions culturelles comme recherches historiques, généalogie, œuvres d'art, littératures, engagements politiques et religieux, sociaux ou culturels...?
Il arrive aussi que des traumatismes anciens soient recouverts par des traumatismes plus récents : ainsi les drames subis par les protestants aux XVI et XVIIèmes S. ont été si douloureux en eux-mêmes qu'ils ont fait oublier les malheurs aussi grands de leurs pères : le tragédie du Désert a pu recouvrir celle plus ancienne de Montségur. Il a fallu arriver au XXème S. pour retrouver et mesurer l'ampleur de ce qui s'est passé bien avant le XVIème S. dans la même région occitane, au XIIIème S. pour un même motif religieux par les ancêtres cathares dont les protestants sont quelque part les héritiers.
Il s'agit là d'une post-mémoire très ancienne donc, ce que l'on peut même nommer une crypto-mémoire, ravivée par la quête d'identité de lointains descendants, soutenue par des symboles dont le sens avait été plus ou moins enfoui, perdu. Les quelques débris architecturaux du moyen-âge ou des noms de lieux nous reparlent enfin; le signe symbolique de la croix effectué encore lorsque l'on rompt le pain dans les campagnes nous rappelle que cet aliment de base était essentiel pour les parfaits (et non pour sa christianisation imposée par l'église triomphante); nous employons des mots courants comme bonhomme et bonne femme, bougre qui nous viennent directement de ce temps lointain; les enfants, autrefois et encore ici ou là, nomment sur le même qualificatif leurs grands-parents bonne-maman et bon-papa; jusqu'à des bribes du Pater Noster cathare qui ont été entendues au fin fond de l'Ariège par le folkloriste Urbain Gibert en 1850 qui en donne témoignage (cf. revue Folklore n° 128, Carcassonne, 1967, P.122), la prière était prononcée par une vieille femme qui la tenait de ses parents, qui la tenaient de ses parents....en un écho séculaire. Et puis des historiens locaux, quelquefois des autodidactes, des associations, des romanciers de l'histoire et autres dessinateurs de BD ont remis au goût du jour tout ce qu'ont vécu nos ancêtres du XIIIème S. dont des Amiel souvent comme je vais essayer de le démontrer dans les pages qui suivent; beaucoup de personnes d'origine lauragaise et languedocienne s'intéressent à cette mémoire passée et volontairement celée par l'Histoire française, enfin retrouvée depuis peu finalement et revenue d'actualité: "L'Aude, pays Cathare" est même devenu une marque (commerciale !) déposée. Enfin beaucoup de personnes à travers l'Occident s'intéressent aussi à cette guerre féodale interne à la chrétienté, en Europe du nord et du sud comme aux Amériques; on vient de très loin visiter les sites de l'Occitanie qui en gardent quelque trace et la mémoire commune, actuelle et future en est ainsi d'autant mieux préservée et diffusée.

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