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HISTOIRE (RELIGIEUSE) OCCITANE DU HAUT MOYEN-AGE
LA SOCIETE LANGUEDOCIENNE
LE CATHARISME ET LE CONFLIT RELIGIEUX ET CIVIL
RELATIONS ENTRE LES TROIS RELIGIONS DU LIVRE
LE PHENOMENE DU CATHARISME et LA KABBALE JUIVE
LE CADRE HISTORIQUE :
Dès le début du XIIème S. et progressivement tout au long de ce siècle, une nouvelle religion s'implante rapidement dans tout le sud de la France, particulièrement en Languedoc. Déjà repéré en quelques endroits au XIème S., il s'agit d'un christianisme totalement différent de celui préché par Rome, incompatible même avec les préceptes fondamentaux des religions dites du Livre. Considérant que ces idées nouvelles lui portent préjudice quant à son implantation territoriale dans la région (et des avantages autant séculiers que réguliers et psychologiques sur les âmes, ce qui va avec), l'Eglise de Rome en la personne de son pape, (Innocent III pour le 1er concerné) de son clergé (tenant toute la société) et de leurs successeurs (pendant tout le XIIIème S. et après) va faire en sorte de maintenir son emprise sur tous les membres de cette société, dans un premier temps par la simple bataille théologique puis, celle-ci étant sans résultat tangible, par l'adoption de techniques radicales réunies sous le nom d'Inquisition, doublée de l'implication royale française qu'elle obtint, par le bras armé de celle-ci lançée dans une effroyable Croisade.
Et pourtant les autres religions du Livre ne semblent pas avoir été très génées par cette religion qui, si elle affirmait la foi en un seul Dieu, Créateur du Bien, mettait quand même à mal la conception théologique de l'unicité divine en proclamant qu'à côté de ce Dieu principe du seul Bien il y avait aussi en action sur la Terre, qu'il gouvernait entièrement, un principe autonome du Mal. Les musulmans avaient été chassés depuis longtemps en tant qu'envahisseurs barbares (les barbaresques) mais il y avait toutefois des relations commerciales, des hommes de culture comme par exemple des enseignants de l'université toulousaine qui permettaient d'entretenir certains rapports avec les occitans, juifs ou catholiques; les juifs étaient bien présents en Languedoc (depuis le IIème S. av. J-C., avec l'arrivée des romains) comme communauté organisée, tolérés autant par les seigneurs que par la population locale (voyez ce qu'en disent les toponymes audois) et là on verra les rapports et relations qu'il put y avoir entre les juifs et les cathares, dans leurs conceptions religieuses comme dans leurs vie sociale. Un sujet qui me semble intéressant vu les origines de notre nom, juif et romain, hébreu et latin, devenant par l'histoire de la nomination, un prénom puis un nom catholique quasi-exclusivement porté (sous la forme générique que nous lui connaissons d'AMIEL) par des languedociens pour une grande part et des provençaux pour une moindre part (constatation quantitative de notre temps qui est peut-être à revoir pour le moyen-âge ?), un nom finalement éminemment relatif aux religions présentes alors dans ce cadre méridional, le catholicisme, sa déviance cathare, et le judaïsme. Pour ce qui concerne l'autre langue sémitique, l'arabe parlé en ces temps anciens au sud des Pyrénées, l'on retrouve le phonème Am dans plusieurs noms d'homme, le nom divin étant exprimé chez les musulmans par le nom Allah, on peut donc voir dans les patronymes Amallah ou Amillah un nom musulman correspondant à notre nom Amiel; si l'on estime que c'est le cas il suffit alors de chercher la signification du préfixe Am lui-même; il parait correspondre à "soumis" faisant dans ce cas des Amallah, des "soumis (à) Dieu", ce qui semble logique pour tout musulman. Mais comme rien n'est simple en la matière, Amallah peut aussi avoir une origine hébraïque (!) dont l'une des variantes est ...Amal, nom que l'on retrouvera avec les Wisigoths (!!); fin de la digression, revenons à la Croisade contre les cathares.
La lutte contre l'hérésie cathare sera une affaire religieuse entre l'Eglise Romaine et l'Eglise Cathare d'une part, une affaire politique entre les seigneurs français (sous la houlette du Roi de France) et les seigneurs occitans (menés par le Comte de Toulouse et le Roi d'Aragon) d'autre part. Ce que l'on peut réunir sous le nom (aux termes assez anachroniques) de 'guerre sainte'; une lutte entre ces parties dans laquelle les pouvoirs (et les motifs) civils et religieux s'interpénètrent et qui va se dérouler sur tout le XIIIème S. Aux luttes théologiques, controverses, conciles, prédications, succèderont deux Croisades (celles des seigneurs du nord sous la houlette de Simon de Montfort puis de son fils Amaury et du roi de France) et surtout l'Inquisition, ses enquêtes, ses procès, ses condamnations et ses bûchers. Qu'adviendra-t-il de tout cela? Pour ce qui est de la religion l'Eglise va éliminer enfin cette déviance cathare et retrouver tous ses pouvoirs antérieurs affermis même, pour ce qui est du pouvoir civil, le roi de France va enfin pouvoir faire entrer dans le giron royal les riches et vastes territoires des seigneurs du Languedoc. La si brillante civilisation occitane, celle des troubadours, de la tolérance, de la latinité et de la romanité, va ainsi s'éteindre rapidement, les seigneurs locaux devant désormais fidélité au Roi français quand ce n'est pas des seigneurs du nord qui succèdent à ceux d'Occitanie sur leurs propres terres. Un voile de silence sur cette longue et horrible période qui vit une Croisade contre des chrétiens ( du jamais vu !) va alors s'abattre dans l'histoire et la mémoire officielle jusqu'à la fin du XIXème S. Mais alors, comme l'avait prédit le dernier cathare brûlé vif à Villerouge-Termenès dans le 1er quart du XIVème S. les Occitans vont enfin retrouver leur mémoire, l'histoire de leurs ancêtres dont ils portent toujours le nom, leur langue qu'ils parlent encore et leur culture dont de nombreuses traces font toujours foi, quelques 700 ans plus tard, au XXème S. Un énorme pan de l'histoire non seulement religieuse et politique méridionale mais aussi nationale initiée dès la fin du XIXème S. par un Napoléon Peyrat dans "Le sang de Toulouse", un ariégeois qui écrit un roman sur ces évènements si lointains, seulement consignés jusque-là par quelques érudits locaux ou les rédacteurs bénédictins de l'énorme Histoire de Languedoc au XVIIIème S du bout des lèvres. De grandes figures au XXème S. suivront la voie ouverte comme les historiens Emmanuel Leroy-Ladurie, Jean Duvernoy ou Michel Roquebert, des penseurs, écrivains, poètes comme Déodat Roché ou René Nelli s'y attacheront et contribueront à reconstituer patiemment non seulement l'histoire de ces temps malheureux pour tout un peuple mais aussi l'état des consciences, la vie quotidienne, les relations sociales, la littérature et la poésie...de nos ancêtres dont beaucoup d'Amiel. Peut-on parler de mémoire retrouvée pour les occitans, dont je suis, je ne pense pas, mais d'histoire reconnue et d'une certaine affection (dans tous les sens du terme) sans doute oui; se dire qu'il se peut fort que l'un de ses ancêtres du XIIIème S. ait été questionné, accusé voire condamné (et à l'extrême brûlé) à cause de sa foi (peu importe laquelle d'ailleurs) en lisant sur les registres inquisitoriaux les mentions de tant d'Amiel languedociens, du Lauragais en particulier, petite région centrale (pays de mes origines), oui se dire cela provoque beaucoup d'émotion et je crois que l'histoire si elle est d'abord faite de mémoire, puis de faits, cadres, causes et conséquences, de recoupements, d'analyse et de vérification par des preuves, de réflexions, peut aussi, encore et enfin se lier comme se lire par l'émotion et ce n'est pas, vous en conviendrez, le moindre de ses intérêts.
LE CADRE SOCIAL ET RELIGIEUX DU CONFLIT :
- Bien versus mal, un conflit immémorial :
On l'a vu dans la partie mythologie (voir page mythologies antiques - Livre d'Enoch), l'on ne peut s'étonner de constater dans l'histoire générale des religions, la récurrence de thèmes liés aux notions opposées de bien et mal : rejet du monde matériel, mythologies de restauration de la belle unité perdue, de la parole perdue, leitmotivs véhiculés par des systèmes polymorphes qui se sont ignorés. Les mêmes archétypes sont à l'oeuvre depuis la nuit des temps constate C. G. Jung et, régulièrement des sages rappellent "à l'humanité plongée dans la turpitude du labyrinthe terrestre sa vocation divine, trahie par les intérêts personnels et les alliances politiques des pseudo-disciples de ceux qui étaient pourtant chargés de la divulguer", voilà qui résume bien l'histoire des religions. Le rapport bien-mal est une connaissance intuitive qui manifeste une permanence de la conscience humaine. Cette disposition au dualisme est à la racine de toute pensée religieuse qui se préoccupe de résoudre rationnellement le douloureux et éternel problème du mal, une obsession telle que le catharisme en fera le thème central de son action.
- Causes du conflit :
Il faut bien voir que l'homme du moyen-âge occidental, qu'il prie, qu'il combatte, qu'il travaille, perçoit le monde qui l'entoure avec des références essentiellement religieuses chrétiennes. Tout son univers est établi à partir de ces références incontournables. La seule préoccupation de sa vie terrestre est son Salut chrétien. Et dès le début du XIème S. et tout au long des deux siècles suivants se fait jour et se manifeste chez de nombreux clercs et laïcs, une angoisse existentielle importante. Beaucoup d'hommes et de femmes pensent avoir "perdu" Dieu, ou que celui-ci se soit détourné, désintéressé de sa création. L'An Mil et sa peur de la fin des temps est heureusement passé: alors qu'on attendait la venue ou plutôt le retour du Messie dans sa gloire, il n'en fut rien, Dieu ne s'est pas manifesté, pourquoi? L'homme se serait-il détourné de son Sauveur? Les liens seraient-ils rompus? Il faut se rapprocher de lui , retrouver Dieu par une démarche intérieure, un retour à la pureté des origines semble nécessaire. Et un peu partout en Europe va souffler un vent de contestation à la fois d'origine sociale et religieuse : Devant les famines, les épidémies et la misère ambiante qui sont perçues comme des punitions divines, les clercs catholiques dont la fonction principale est justement de "relier" Dieu à ses créatures et de fixer les règles, le cadre de cette relation (et ses interdictions comme par ex. les relations avec les juifs) ce clergé donc sera bien évidemment le bouc-émissaire désigné de cette contestation générale, il porte par ses erreurs la responsabilité de leur misère sociale.
- La séparation matérielle et doctrinale, le conflit :
Le rôle d'intermédiaire du prêtre se pose, d'autant plus que les supérieurs ecclésiastiques sont plus préoccupés de conserver leurs prérogatives et de récolter les impôts qui les font vivre grassement que de vivre selon les préceptes évangéliques de pauvreté et de charité dont ils se réclament et qu'ils font prêcher. Voilà une situation qui se renouvellera quelques siècles plus tard et sera la cause d'une autre réaction protestataire, celle justement du Protestantisme. La papauté, consciente de la nécessité de réformer son clergé tout comme d'un approfondissement de la foi, on parlerait de nos jours de recadrage, va essayer de canaliser cette protestation générale en encourageant notamment le mouvement monastique que guident par ailleurs des hommes d'une grande spiritualité. Mais Rome malgré tous ses efforts, la mise en avant de l'humilité monastique exemplaire, sa vocation d'étude des textes et de travail autant intellectuel que matériel (ils ont créé en somme l'aménagement et la mise en valeur des territoires où ils s'installèrent), au caractère publicitaire évident, ne parviendra pas à juguler l'émergence d'un violent anticléricalisme. C'est une manière de procéder que l'on peut analogiquement comparer à l'action politique, hier comme aujourd'hui ! On verra des clercs molestés, raillés, des croix brûlées, des églises saccagées, car l'on passera facilement de la remise en cause des clercs à celle de leur message religieux. Et des hommes de foi, hors du cadre romain, vont se faire jour, s'élever, explorer, redécouvrir, hors des chemins du dogme officiel, des voies différentes de ce Salut; ils vont alors propager ouvertement dès le début du XIème S. des doctrines contestant les enseignements de l'Eglise, allant même jusqu'au rejet du symbole suprême de celle-ci, la Croix du Christ.
Ce rejet du symbole sacrificiel, objet publicitaire de l'église, est essentiel: La croix, chrétienne s'entend, avec une longue hampe différente de la croix dite cathare ou du Languedoc aux branches égales, est l'instrument du supplice du Fils de Dieu, de son humiliation volontaire pour sauver les hommes et les cathares abhorreront cet instrument de souffrances, ils diront à ce propos "Adorerais-tu la corde qui a pendu ton père?" en adversaires résolus de toute violence. La situation devient grave, d'autant que ces courants idéologiques se réclament des Evangiles qu'ils se sont permis de traduire en langue vulgaire (ici l'occitan), ils attirent facilement les foules et tirent à boulets rouges sur cette Eglise Catholique qui ne délivre plus le message d'Amour et de Charité transmis par les Apôtres dont elle se dit pourtant l'héritière et la garante malgré le message d'Assise. Au début l'Eglise prêtera une oreille attentive et assez complaisante à ces mouvements mais elle sera dépassée par l'ampleur et la multiplicité des formes de contestation, les déclarera tous "hérétiques", c-à-d non conformes au dogme officiel et les combattra par de nombreux moyens, le plus perfide et efficace sera l'invention de l'Inquisition, le tribunal religieux qui perdurera très longtemps (notamment en Espagne) ou en utilisant en sous-main le bras armé du pouvoir civil par une sorte de contrat de donnant-donnant entre le pape et le roi. De même à coup de sentences doctrinales concernant l'interprétation ou la traduction des Ecritures, l'interdiction pour les laïcs de posséder la Bible (article 14 du Concile de Toulouse de 1229) l'Eglise voudra en imposer car à cette date-là en maints endroits du sud, au moins dans les cœurs, le catharisme avait bel et bien supplanté le catholicisme romain et trouvait dans les textes saints eux-mêmes les justifications de sa doctrine et une pleine autonomie doctrinale; c'est ce qui justifiera aussi l'action protestante au XVIème S..
- La religion cathare ou des Bons Chrétiens :
De tous les mouvements religieux contestataires qui se firent jour durant le XIIème S. le catharisme fut le plus important, de par la large audience qu'il reçut dans la société languedocienne. Mais il est aussi présent un peu partout en Europe; des communautés cathares d'apôtres itinérants sont attestées sous des noms différents: outres les cathares occitans (appelés albigeois, bonshommes, parfaits) il y eut aussi les piphles, les publicains, les tisserands, les bougres, les patarins; d'importants foyers de ces croyants existeront alors dans le nord et le centre de l'Italie, en Allemagne ou dans les Flandres; en France dans les Pays de Loire, en Bourgogne et en Champagne; en Savoie fleuriront les vaudois. En comptant les bogomiles de Bulgarie et de Bosnie d'où provient selon certains cette croyance, en tous cas avec lesquels il y eut des liens doctrinaux étroits, on peut affirmer que c'est de l'Angleterre à l'Asie Mineure que s'étend la présence et l'influence de ceux que nous appelons aujourd'hui du terme générique de "cathares", les purs mais qu'eux-mêmes n'employaient pas. L'Eglise leur donne le nom de manichéens ou ariens et plus généralement d'hérétiques. Ils seront pourchassés partout mais ce ne sera la guerre contre eux qu'en Languedoc; guerre sainte doublée de Croisade armée puis d'Inquisition, l'arsenal répressif multiple saura rendre gorge à ces infidèles du pape (et du roi). Que leur était-il reproché de si grave, au fond, pour falloir les éradiquer ainsi? On peut voir par les quelques traces de leur doctrine et de leur liturgie et des milliers de minutes procédurales des dossiers inquisitoriaux qu'ils étaient avant tout des chrétiens, que leur foi très vivante était vécue par eux au quotidien. Ils se réclament du Christ et des Evangiles (surtout celui de Jean) mais ils ont leur version divine du Dieu Bon opposée au Mal régnant sur la Terre; leur propre vision du Christ comme leur approche des textes les éloignent fortement du catholicisme romain officiel, seul permis et obligatoire.
Contrairement au catholicisme, le catharisme peut être vu comme une religion initiatique et personnelle; c'est à chacun d'entamer sa propre démarche, par la stricte application des préconisations évangéliques (paix, humilité, charité, partage, justice...) le simple croyant parviendra à débarrasser son âme de son carcel de matière charnelle et atteindra Dieu. Ce n'est plus Dieu qui va vers l'homme pour le sauver par sa souffrance sur la croix, ce qu'enseigne le catholicisme, mais par la prise de conscience suivie de la recherche permanente des voies du salut, c'est au croyant de s'élever vers lui, de devenir "parfait", un "bon homme". En d'autres mots, l'homme est Christ en puissance (Jean, 14). il n'appartient qu'à lui de le devenir en vérité. Et dans un tel cadre, l'église de Rome sa hiérarchie et ses clercs ne servent à rien ! C'est pour ces nouvelles façons, renversantes pourrait-on dire! de croire de vivre et d'espérer que les hommes vont s'engager dans cette religion : Les croyants ne sont plus ces êtres passifs et angoissés qui devaient implorer une grâce divine inapprochable censée les sauver, mais au contraire, des êtres tout à fait libres qui veulent s'élever vers Dieu par des efforts réguliers afin de gagner leur salut personnel. On voit par là que cette église nouvelle est aussi purement spirituelle; il n'y a que peu de culte, pas de lieu spécial pour les quelques cérémonies sacramentelles; celles-ci sont très simples, dépouillées, accessibles à tous et se déroulent le plus souvent dans les maisons, là où l'on vit et où l'on travaille (beaucoup de croyants cathares furent tisserands), ou tout simplement dans la nature. Toutefois la société languedocienne a nettement contribué à son développement méridional. Enfin ces manières de voir se retrouveront dans le protestantisme deux siècles plus tard.
- La société languedocienne :
Je l'ai déjà dit il est patent que les occitans ont fait preuve, de tous temps et jusqu'à nos jours d'un esprit de tolérance remarquable, plus souple et plus étendu que dans la France d'Oïl, la vraie France comme disait un grand homme d'au-dessus la Loire. Il existe alors au moyen-âge, dans ce Pays d'Oc, une notion très spéciale inconnue au nord, qui influence les comportements sociaux, il s'agit du "paratge", on l'a dit. En lien avec des qualités morales de ces temps féodaux, ce comportement veut que des classes sociales différentes puissent posséder un honneur et des dignités comparables; ce n'est pas d'une égalité de droits dont il s'agit ici, bien entendu, mais de respect des personnes, d'une sorte d'égalité d'âmes. Notons ici que le servage est alors inconnu dans ces régions, bien qu'il puisse être "attaché" à sa terre, le paysan peut s'il en a les moyens financiers, accéder à la propriété et le bourgeois, lui, peut devenir chevalier et donc accéder à une (petite) noblesse. N'oublions pas que la romanité méridionale a gardé beaucoup de caractères de la présence romaine, dans beaucoup de domaines dont le droit (de la terre, des personnes, de la propriété ...) . Il faudra bien des siècles ailleurs pour en arriver à de telles éventualités.
Pour ce qui concerne le sort des femmes il faut dire qu'ici elles ont le droit de commercer et leurs avis, qu'elles peuvent exprimer publiquement, sont pris en compte. Chez les cathares elles sont reconnues égales aux hommes et elles seront leurs plus fidèles partisans et défenseurs, ce quel que soit leur classe et surtout peut-être chez les nobles locaux. La bourgeoisie, commerçante et riche, s'affranchira de la tutelle de l'abbé comme de celle du seigneur et défendra jalousement ses avantages financiers, commerciaux et politiques. A Toulouse, les Capitouls élus parmi eux, dont les Amiel de Tréville sont un brillant exemple, élus à la fois par la petite noblesse et les commerçants bourgeois, veillent sur les libertés communales reconnues par le seigneur comte et administrent la ville.
La société occitane est une société de libertés: libertés communales (consulats urbains, chartes), libertés des hommes, et libertés des esprits aussi. Les idées ne connaissent pas de frontières et ici elles sont reçues avec curiosité d'abord, avec tolérance surtout, puis aussi avec intérêt, on sait que les chrétiens y vivent en totale harmonie avec les juifs et des musulmans. Cette liberté sous tous les tons ne pouvait qu'accueillir favorablement le catharisme et celui-ci ne pouvait qu'y s'épanouir. Conjointement à cela la région accueillera aussi les juifs venant d'Espagne et notamment des lettrés, auxquels il sera fait appel pour traduire la Bible (acte évidemment sacrilège pour l'Eglise de Rome). Des relations ont certainement rapproché les deux communautés; avant la Croisade les juifs vivaient dignement dans nos régions méridionales, ils jouissaient même d'une véritable estime et de considération qui leur ouvrit la porte à des charges honorables (comme professeurs aux côtés des chrétiens et des musulmans à la faculté de Toulouse par ex.). Ce n'est que vers 1240 avec l'accaparement du comté languedocien par le roi de France que les attaques de celui-ci contre les juifs vont aller en s'accentuant. On sait qu'ils furent banquiers traditionnellement mais aussi parfois viguiers, juges ou bayles selon le bon vouloir des seigneurs. Des seigneurs qui les protègent bien souvent comme le vicomte Trencavel qui, en 1209, lors du premier et sanglant épisode de la Croisade, alors qu'il se retire de sa ville qui sera saccagée, emmène avec lui tous les juifs de Béziers car il savait que ceux-ci avaient tout à redouter des antisémites de l'Eglise Romaine et des barons de l'armée des croisés mais aussi que ces personnes lettrées, ayant des connaissances précieuses en beaucoup de domaines lui étaient utiles.
CONSEQUENCES DE LA CROISADE SUR LES JUIFS LANGUEDOCIENS :
Bien que les juifs n'aient eu rien à voir avec la croisade elle-même, elle eut des conséquences sur leur vie : les seigneurs locaux, rentrant à contre-coeur dans le giron de l'église durent les écarter des charges publiques de l'ancien temps occitan. D'ailleurs les conciles régionaux successifs n'eurent de cesse de leur rappeler cet objet en raison de l'influence que les doctrines de certains rabbins et non des moindres (cf. la kabbale d'Issac l'Aveugle à Narbonne entre 1185 & 1235) pouvait avoir eu sur l'hérésie cathare (Conciles d'Avignon dès 1209, Narbonne 1227 et le traité de 1229). Durant ce XIIème S. la conversion de chrétiens au judaïsme est notable comme je l'ai dit et cela est prouvé par la répression dont ils furent l'objet, donc on peut penser que l'œuvre des rabbins porta ses fruits. Il y eut aussi l'inverse, c'est le phénomène nommé "marranes", initié en Espagne moins d'un siècle plus tard, ce surnom signifiant 'porcs', qualificatif des juifs passés au catholicisme et dont on doutait fort de la sincérité de la conversion comme je l'ai indiqué dans la partie Amiel nom juif; toutefois si ceux-ci espéraient ainsi retrouver des situations sociales antérieures, ce ne fut pas le cas car leur origine leur interdit les fonctions civiles. Il y eut bien entendu des exceptions comme à Narbonne car là le mouvement commercial était entièrement entre leurs mains, ils y conservèrent certaines charges comme celle de courtiers et les gardèrent jusqu'à l'expulsion royale de 1306. Mais les juifs durent cependant subir (ils en avaient l'habitude dirons-nous) un certain nombre de 'vexations' : séparation d'avec le reste de la population (quartiers juifs) pour éviter le prosélytisme qui était proscrit, port d'un signe distinctif, la 'rouelle', interdiction de construire de nouvelles synagogues et de séjourner dans les petites villes. Prescriptions qui furent peu suivies bien que très souvent rappelées par les représentants locaux des pouvoirs civils et religieux surtout dans les conciles régionaux de ce siècle. Il s'y ajouta plusieurs vexations pratiques comme les sorties durant la semaine sainte de Pâques, les repas (la viande) ou l'exercice de la médecine mais tout cela fut peu suivi. Pour ce qui est de la médecine on doit savoir tout ce que l'Ecole de Médecine de Montpellier, la plus vieille au monde dit-on, leur doit; l'art médical qu'ils y enseignèrent leur venant comme on le sait des musulmans qu'ils avaient tant côtoyé en Espagne (lesquels musulmans arabes tenaient ces secrets d'autres peuples avec lesquels ils furent en contact commercial, indous et asiatiques); on voit même des grands seigneurs se faire soigner par eux comme Alphonse de Poitiers, seigneur français devenu comte de Toulouse par la mainmise française. En ce qui concerne la matière financière ils subirent aussi de nombreuses vexations : règlement des dettes par leurs débiteurs, taux de l'usure, et selon leur fortune propre des confiscations, taxes, nouveaux impôts, rachats de droits d'établissement, de possession de biens. Pour ce qui est de la justice les peines à eux infligées pouvaient être monnayables tout comme le droit de culte (!) israélite. Et le comble de tout fut que l'on arriva à la "possession" de juifs : Il y eut des juifs du roi, de seigneurs locaux, de puissants de l'église, du pape même et tout un droit se développa autour de ce sujet aberrant. D'une manière générale cela s'appliqua dans tout le Languedoc sauf et c'est particulièrement remarquable, à Narbonne; le contrecoup de la croisade pour eux fut inexistant dans cette cité. Ils continuèrent de vivre et commercer comme par le passé sous la double protection du vicomte et de l'archevêque et surent même se serrer les coudes pour la défense de leurs coreligionnaires (par exemple Meir Ben Simon en 1245). Leur communauté put élire officiellement pour cela un "roi des juifs" qu'ils disaient d'antique origine; c'est le thème du fameux roman médiéval "Philomena" dont le seul exemplaire enluminé précieusement est le trésor de la Bibliothèque de Carcassonne; un privilège relevant selon la légende d'un droit que leur aurait accordé Charlemagne en remerciement d'un soldat juif qui se serait sacrifié pour lui. Bien entendu ce roi devait être de la descendance de David (comme le Christ) et le 1er d'entre eux fut Kalonymos (cité par l'espagnol Benjamin de Tudèle), fils du grand prince Théodore (Théodoric ?) qui eut de grands biens héréditaires. Ces rois se succèderont jusqu'en 1306 (date de l'expulsion royale) pendant plus de 130 ans, le dernier étant Ben Todros. On a à Narbonne durant ce siècle une véritable oasis hébraïque en plein milieu chrétien même si ces juifs sont de véritables "valeurs sur pied" que l'on s'échange ou que l'on se transmet comme un vulgaire bien meuble; ces juifs comme ils l'ont toujours fait, deviendront là de véritables occitans, possesseurs de biens fonciers, doués de capacités juridiques comparables aux chrétiens et toujours des industrieux et financiers hors pair, médecins et lettrés.
(=> "Les Juifs du Languedoc antérieurement au XIVème S." G. Saige; Picard, 1881).
RELATIONS ENTRE CHRETIENS JUIFS ET MUSULMANS :
On peut affirmer car des preuves existent que de bonnes relations unissaient les croyants des trois religions du Livre, dans l'Occitanie comme dans tout le bassin de la Méditerranée.(par ex. les documents de la Genizah du Caire, datés pour les plus anciens du XIème S.) et pour ce qui concerne notre nom Amiel même si peu de documents nous renseignent sur leurs rapports quand à la religion de leurs pères, constatant que l'on a des Amiel juifs bien installés en Catalogne, comme on a eu des Amiel gallo-romains ou ibéro-romains en nombre sur tout le large littoral de l'Espagne à la Provence auparavant et comme l'on trouve de très nombreuses familles Amiel (catholiques) interrogées par l'inquisition, de nombreux personnages de l'aristocratie régionale aussi (d'origine soit gallo-romaine soit wisigothe) qui portent notre nom (voyez la longue liste des pages qui suivent) on peut toujours penser que certains d'entre eux, profitant de l'équivalence si ce n'est orthographique en tous cas consonantique de notre nom dans les religions juive et chrétienne, ont peut-être changé de religion pour s'accorder avec leur vie et dans l'intérêt de celle-ci et de leur famille. Ce fut sans doute le cas pour d'autres noms qui devinrent aussi patronymiques et portés par de nombreux catholiques plus tard comme le nom Vidal ou Astruc qui sont connus pour être juifs en ces temps éloignés et toujours présents aujourd'hui dans le "midi" catholique; il faut en effet savoir que plusieurs fois dans l'histoire les juifs eurent la possibilité de se convertir et certains usèrent de cette faculté provisoire. Mais revenons aux rapports entre les croyants des trois grandes religions monothéistes d'alors: Les documents précieux de la Genizah du Caire font état d'une population surtout urbaine pour lesquelles les connexions et liaisons familiales ou commerciales mènent le lecteur de la lointaine Perse (Samarkand) à Séville, en desservant les étapes portuaires de Venise, (Pise), Gênes, Marseille ou Narbonne. Bien entendu on y parle surtout de la vie des juifs en Méditerranée mais on y découvre en même temps les liens qui les unirent aux familles chrétiennes comme musulmanes. Et les rapports religieux comme ceux des conversions évoquées plus haut y sont posés clairement. Schlomo Dov Goïtein qui les a étudiés dans la 2ème moitié du XXème S. a pu écrire à ce sujet : "Le témoignage massif et fiable des documents de la Genizah prouve que les rapports entre musulmans, chrétiens et juifs étaient très étroits, à un degré très supérieur à ce que l'on aurait pu conclure des documents littéraires". Dans les contrées musulmanisées le sort des chrétiens aurait été identique à celui des juifs, ça rapproche : port obligatoire d'insignes distinctifs comme ceinture, chapeau, c'est ce que nous affirment les sources littéraires: pourtant Goïtein n'a pas trouvé de telles références dans les documents étudiés; plus même il mentionne des situations devant le tribunal coranique où les témoins ont tenu à déclarer leur confusion à l'égard de la religion des personnes inculpées, ce qui confirme bien qu'il n'existait pas de telles pratiques chez les musulmans; peut-être faut-il y voir une fausse justification de ce qu'ont par contre réellement pratiqué les chrétiens (leur pouvoir civil) à l'égard des juifs, de nombreuses fois dans l'histoire et en plusieurs régions de l'Europe. Il est certain que dans une telle société méridionale si mêlée il y ait eu des conversions; et elles se produisirent dans tous les sens affirme Gôltein; toutefois les plus nombreuses n'ont pas été celles des juifs au christianisme comme on veut nous le faire croire souvent, mais celles des chrétiens au judaïsme! Maïmonide (né à Cordoue en 1138- mort en Egypte en 1204) encouragera dans ses lettres l'activité missionnaire chez les chrétiens et non pas chez les musulmans, et cela pour des raisons uniquement théologiques car les chrétiens, disait-il, acceptaient déjà l'autorité de l'Ancien Testament. Il faut dire aussi que les conversions 'forcées' sont interdites dans l'Islam, qui réserve une place aux non-musulmans, auxquels on laisse alors la liberté de pratiquer leur religion (avec des contreparties vexatoires, souvent financières, bien entendu). Mais comme le remarque aussi Göltein la conversion du christianisme au judaïsme ou le contraire était interdite par l'islam, sur ses terres. Ces conversions purent donc se pratiquer surtout dans les régions chrétiennes dont le Languedoc ou la Provence.
RELATIONS ENTRE JUIFS ET CATHARES :
Donc des relations applicables entre des Amiel juifs et des Amiel chrétiens (catholiques invétérés sans doute peu nombreux alors en Languedoc, plutôt simples sympathisants cathares plus nombreux); peut-être enfin entre des Amiel toujours juifs et certains convertis par peur ou intérêt au catholicisme! Malheureusement malgré toutes ces conditions favorables à l'épanouissement de telles relations, malgré aussi le fait que le catharisme soit né et se soit développé dans ce sud languedocien tout comme dans la Catalogne ibérique de ces XII et XIIIèmes S, la recherche historique ne s'est pas encore penché sur ces relations. Des régions encore où existèrent alors d'importantes communautés juives (les plus importantes de la zone d'influence française), au moment aussi où fut développée la fameuse Kabbale, véritable phénomène historique: cette théosophie juive originale remontant au IXème S. voire VIIIème s'est en effet fixée par écrit vers 1150 en Provence avec Isaac l'Aveugle. Cette doctrine présente comme traditionnelles une nouvelle histoire de l'enfantement du monde ainsi qu'une nouvelle métaphysique du rapport de l'homme avec le monde. Tardivement le catalan Raymond Lulle philosophe et alchimiste, très proche du Temple, synthétisera au XIIIème S. cette kabbale avec une nouvelle philosophie chrétienne templière et l'on verra que les templiers eurent de bons rapports avec les cathares, n'ayant pas participé à la Croisade contre eux. Les chercheurs de notre époque s'intéressant soit à la kabbale soit aux cathares ont ignoré les allégations des contemporains des uns et des autres. Même les spécialistes du catharisme comme Arno Borst, ayant analysé les influences du temps et du lieu et les ont jugées dominantes (à côté de l'influence des bogomiles bosniaques), n'ont pas jugé utile d'examiner la possible influence mutuelle entre cathares et kabbalistes. Pour autant que l'on sache, E. Delaruelle et René Nelli sont les seuls à avoir pressenti cette éventuelle influence, soulignant les activités de ces deux courants de pensée à la même époque, dans le même environnement géographique et culturel, mais ils n'ont pas poussé leurs investigations pour étayer leur hypothèse. Quand on voit qu'une Rue des Bonshommes côtoie la rue de la Juiverie comme c'est le cas à St Gilles du Gard, ville alors des Comtes de Toulouse, ville de leurs origines qu'ils citaient en premier dans leurs titres seigneuriaux, il y a tout lieu de penser que cette présence et cette proximité ne furent pas que géographiques et encore moins accidentelles ou même voulues par le comte; en tous cas elle furent tolérées par lui comme par les habitants. Peut-on conclure qu'à l'instar des juifs, les cathares de St Gilles formaient un groupe à part? Cela est probable, on ne parle pas beaucoup dans les textes des cathares de ce lieu. Les uns comme les autres y furent des 'marginaux' (les juifs jouissant cependant de privilèges qu'ils payaient), pratiquant là chacun une religion minoritaire, dans une cité dominée par les catholiques.
RECHERCHE SUR LES RELATIONS JUIFS - CATHARES :
On a longtemps pensé que tous les cathares niaient l'Ancien testament qu'ils considéraient comme l'oeuvre du dieu mauvais et donc l'influence réciproque entre eux et les juifs, entre leur doctrine et la kabbale ne pouvait être possible. Mais une lecture nouvelle des écrits cathares et même de certaines sources anti-cathares nous prouve qu'incontestablement cette opinion était erronée. On sait que les deux tendances cathares qui diffèrent par la conception des deux principes, le Bien et le Mal, se nomment dualisme absolu et dualisme mitigé: Les dualistes absolus ont accepté la plupart des Livres de l'A. Testament (certains même totalement), les dualistes mitigés auraient refusé la plupart de ces Livres mais il existe au moins une preuve que cela est faux. Un texte écrit en provençal (occitan) identifié comme réellement cathare, une glose sur le Pater Noster cite les textes de pas moins sept prophètes, les psaumes, les Proverbes, le Cantique des Cantiques et le Deutéronome.
On trouve aussi chez eux, même s'ils y apportent quelques changements et additions, les textes de la Vision d'Isaïe (commentée d'ailleurs dans un interrogatoire inquisitorial) et la Cène secrète. Alors qu'il est interrogé un cathare indique qu'il "avait des doutes sur sa foi; un ange lui apparut, le prit sur son épaule et le porta vers les cieux...Au 7ème ciel, l'ange lui ordonna de rendre hommage au Père saint de ce ciel, car c'était le Père Saint du Peuple d'Israël. Les habitants de ce ciel chantaient des hymnes de Sion mieux que les habitants des autres cieux"; achevant sa déposition ce sympathisant cathare indique enfin qu'il a entendu les parfaits dire que seront sauvés non seulement les esprits purs (ceux des cathares 'consolés') descendus du Ciel mais aussi "tout le peuple d'Israël".
Voilà quelques points communs entre cathares et juifs, notamment comme on le verra, les qaraïtes (secte juive née au IXème S. présente encore au XIIème sur la même aire géographique que le catharisme, mais depuis l'Asie Mineure jusqu'en Espagne). Il faut encore remarquer que l'on ne trouve pas de prise de position évidente dans la théologie cathare envers le judaïsme alors que le positionnement catholique est lui très clair, c'est le rejet en bloc. Enfin il existe au moins une mention des juifs dans un document éminemment cathare intitulé "L'Eglise de Dieu", texte apologétique accompagnant la gnose du Notre Père dans le manuscrit de Dublin : Les brebis citées sont les cathares et les chèvres sont les païens, les juifs et les gentils; ils sont persécutés comme les cathares tout en n'étant pas de la même filiation qu'eux et ici cette différence ne veut pas signifier rejet.
Donc il n'est pas possible au vu de tout cela de réfuter d'emblée la possible influence réciproque entre cathares et kabbalistes. Il se trouve au moins un chercheur, universitaire juif de Tel-Aviv qui a comparé deux écrits, le Sépher Ha Bahir (livre de la Clarté) et une œuvre d'Abraham Aboulafia.(cf : "Ecrits cathares et commentaire d'A. Abulafia sur le Livre de la Création : Images et idées communes" art. de Shulamith Shahar in "Juifs & Judaïsme de Languedoc, XIII- début XIVème S" éd. M-H Vicaire & B. Blumenkranz 1977). Aboulafia est un navarrais juif installé à Barcelone, il parle de mystiques non-juifs qu'il rencontra en Catalogne; on sait que les relations catalano-languedociennes étaient importantes alors, non seulement parce que les régions étaient proches, que leurs seigneurs (et leurs possessions) l'étaient aussi mais encore parce que le climat spirituel et religieux l'était également (on connait les pérégrinations des cathares dans ces régions nord et sud pyrénéennes aux XIII et XIVèmes S. devenant même leurs refuges). Tout comme le catharisme né en Languedoc, la kabbale juive s'est répandue depuis les villes languedociennes vers le sud, vers la Catalogne, Gérone & Barcelone et, comme chez les cathares, les communautés juives des deux côtés des Pyrénées furent en contacts étroits. En un autre endroit il parle même d'une "disputatio", une controverse, débat théologique, qu'il eut avec un savant chrétien avec lequel il s'était lié d'amitié et à qui il avait inspiré la volonté de connaître le Nom de Dieu.
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