JOSEPH MARIUS AMIEL DEPORTE à AUSCHWITZ :
Joseph Marius Amiel est né le 11 Janvier 1913 à Tuchan, un bourg viticole des Corbières audoises. Il est le fils de Joseph Jean-Baptiste cultivateur et viticulteur. Chauffeur-livreur jusqu'en 1937, il se marie en 1936 et aura une fille née en 1939. Il entre en 1937 à la SNCF comme cheminot à la Gare d'Austerlitz; le ménage habitera pas très loin, rue de Clisson dans le XIIIème arrondissement et c'est là qu'il sera arrêté. Communiste dans l'âme comme tant de ses collègues en ce temps-là, il va distribuer, durant l'Occupation allemande, des tracts du PC clandestin (le parti fut bien évidemment interdit); il sera arrêté le 23 Juillet 1941 à 10h par deux inspecteurs qui perquisitionnent le logement, sur dénonciation; c'est ce que l'on apprend par une lettre qu'il envoya à une tante. On trouve chez lui 200 tracts; Marius, c'est par ce prénom usuel qu'il est surtout désigné, est écroué à la prison parisienne de la Santé, 11ème division, cellule 4.
Dans sa lettre depuis la Santé (7 Août 1941) il écrit qu'il a été jugé en flagrant délit dès le 25 Juillet; il est condamné à 8 mois de prison pour propagande en faveur de la 3ème Internationale Communiste et craint bien entendu d'avoir ainsi perdu son emploi; il semble toutefois ne pas trop s'en faire pour lui, c'est surtout à son père qu'il pense et pour qui il s'inquiète; il demande à ses proches à qui est destinée cette lettre, de ne pas informer ses parents de ce qui lui arrive.
Le 16 Août 1941 il est transféré en banlieue, à la prison centrale de Poissy, dans les Yvelines où il est affecté à la papeterie 12 avec le numéro d'écrou 1861. Le 7 Septembre il écrit à sa sœur jumelle Marcelle et à son frère Raymond; on y lit qu'il espère voir bientôt son épouse Antoinette et sa fille qui sont alors hébergées à Enghien dans la famille de son épouse. Il est ensuite transféré à Fresnes; de là il écrit aux mêmes qu'il devrait être libéré le 17 Mars 1942. Mais alors que cette date arrive, sur décision du Préfet de Paris et après avoir passé un temps au dépôt de la Préfecture, à la Conciergerie, il est alors interné administrativement au "camp de séjour surveillé" de Voves en Eure-et-Loir qui avait ouvert le 5 janvier 1942. Il y arrive le 16 Avril suivant avec 60 autres prisonniers du dépôt. Le 10 Mai il est transféré avec 80 autres au camp de Royallieu situé à Compiègne (Fronstalag 122). Et là sa situation va devenir irréversible; affecté au bât. C5, chambre 11, il reçoit le matricule 5713. Le 15 juin 1942 il peut encore écrire à sa mère et à son frère qu'il est en bonne santé mais il sera embarqué le 6 juillet 1942 dans un train de la mort pour Auschwitz. Ce convoi d'otages qui fait partie de ceux que l'on nommera les "45000" est composé essentiellement d'un millier de communistes (responsables politiques, militants, et syndiqués de la CGT qui y est très liée en ce temps-là) et d'une cinquantaine d'otages raciaux juifs: de ce train seront enregistrés à l'arrivée 1170 hommes. Ce convoi fait partie des mesures de représailles allemandes destinées à combattre en France ceux que l'on nommait les "judéo-bolchéviks" responsables aux yeux de Hitler des actions armées organisées par le PC clandestin contre la Wehrmart à partir d'août 1941.
Le convoi arrive à Auschwitz le 8 Juillet 1942. Il est enregistré dès son arrivée sous un nouveau numéro, 45170, ce numéro lui est tatoué sur l'avant-bras gauche comme à tout déporté, il tient une pancarte avec ce numéro sur sa photo conservée; on le voit portant le pyjama rayé impersonnel et surtout le triangle rouge (pointe en bas) fixé sur sa poitrine, frappé de la lettre F en noir. Le triangle rouge fait explicitement référence aux luttes ouvrières de la fin du XIXème S. dont il fut le symbole et signale pour les nazis les déportés dits politiques, activistes communistes comme syndicalistes opposés farouchement au IIIème Reich; la lettre 'F' signifiant le pays d'origine, France. (cf. Musée d'Etat d'Auschwitz-Birkenau à Oswiecim (Pologne) - Collection Mémoire Vive). C'est sa fille qui a mis son nom, remis faudrait-il dire, sur son visage. Aucun document des archives SS sauvé de la destruction ne permet de savoir quand il est mort; se souciait-on vraiment dans ces camps d'extermination de ce détail d'ailleurs, ce qui importait pour les nazis c'étaient les statistiques permettant de planifier ces arrivées sans retour.
Le 3 juillet 1946 le ministère des Anciens Combattants a fixé fictivement sa mort au 31 Décembre 1942, sur la base du témoignage de deux de ses compagnons d'infortune rescapés de cette mort pourtant programmée et inéluctable, Georges Hanse et Etienne Pessot. La mention "Mort en déportation" ne sera pourtant apposée qu"en mai 1987 (!?) par parution de son acte de décès au Journal Officiel. Il a été homologué comme "Déporté politique". Sur attestation du réseau Résistance-Fer il sera considéré comme sous-lieutenant au titre des Forces Françaises Combattantes pour services accomplis en tant qu'agent P2 et en qualité de chargé de mission de 3ème classe. Bien piètres consolations pour sa famille.
(=> Son cas à fait l'objet d'une biographie provisoire par Claudine Cardon-Hamet, auteure de : "Triangles rouges à Auschwitz, le convoi du 6 Juillet 1942" Ed. Autrement, 2005, Paris; de : "Mille otages pour Auschwitz, le convoi du 6 Juillet 1942 dit des "45000" Ed. Graphein, Paris, 1997 & 2000; et du site internet : politique-Auschwitz.blogpost.com, article de nov. 2011).
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